Pour une communication associative solidaire
Un manifeste pour celles et ceux qui veulent parler sans se vendre.
Pour une communication alignée, libre, fidèle aux valeurs associatives.

Parce que les associations ne sont pas des marques.
Trop d’associations ressentent aujourd’hui la pression de “communiquer comme une entreprise”. Séduire. Capter l’attention. Optimiser les clics.
Mais une association ne vend pas un produit.
Elle défend une cause. Elle incarne une vision. Elle engage des humains pour d’autres humains.
Le texte de référence que nous soutenons
Communiquer n’est pas vendre.
Pourtant, dans une approche gestionnaire, la communication est au service de l’image de l’organisation marchande, voire du développement de ses ventes. Ce n’est plus une relation humaine au cœur de la démocratie, mais une technique qui renforce la marchandisation du monde. C’est pourquoi il est nécessaire que les associations citoyennes décolonisent les pratiques de communication, pour contribuer pleinement à revitaliser notre démocratie malade. C’est l’objectif de ce texte.
I. Démarchandiser et repolitiser la communication des associations
La communication est trop souvent associée au marketing et, en particulier, à la publicité. Conception qui, pour nos associations, pose des problèmes éthiques, en plus d’être inefficace. Pour démarchandiser les pratiques communicationnelles, nous proposons de concevoir la communication comme un phénomène complexe qui réclame l’égalité, vise la liberté et rencontre l’incommunication.
I.1 Sortir d’une communication associative marchande et gestionnaire
Si la communication marketing vise initialement à persuader en vue d’augmenter les profits, elle s’est progressivement étendue à d’autres domaines. Dans le cadre des causes d’intérêt général, on parle de marketing social. Dans cette conception, reprise dans Marketing et communication des associations, les objectifs communicationnels des associations sont définis comme suit : obtenir des ressources humaines et financières, faire connaître l’association à ses publics, et agir en fonction de ses missions. Ces objectifs entraînent des pratiques et des méthodes variées, susceptibles de créer des contradictions entre les fins recherchées (changer le monde) et les moyens utilisés (développement de la marchandisation), posant ainsi un problème éthique.
En interne, l’adoption de techniques marketing crée aussi des tensions : impression de vendre son âme, résistance à la simplification excessive de situations complexes, recours à la culpabilisation – autant de sources de dissension entre membres et bénévoles, entre salarié·es et bénévoles. De plus, le siège encadre la parole et l’action des membres pour assurer une image claire, ce qui peut être démotivant et restreint l’expression des membres. Enfin, le vocabulaire marketing employé au sein des associations (cible, marque, concurrent) contribue à l’intériorisation de la marchandisation.
L’intégration de cette approche gestionnaire de la communication, qu’elle soit marketing (externe) ou managériale (interne), aboutit à ce que Jürgen Habermas nomme la colonisation de l’espace public et de la société civile. Heureusement, cette « colonisation » peut être contrée par les associations citoyennes, et c’est là tout l’enjeu de l’associationnisme.
L’associationnisme peut être défini comme un mouvement prônant « l’extension de la démocratie par l’action volontaire de citoyens libres et égaux », visant à réformer l’ordre social, politique et économique. L’associationnisme porte l’idéal d’une société sans domination, c’est-à-dire libérée de toute forme de servitude, notamment celle des forces du marché comme celle de l’État. Les associations, en rendant publics les problèmes sociaux, participent à leur visibilité dans l’espace public. Leur expression dans l’espace public soutient donc la démocratie par le biais d’un projet social, et se différencie de la promotion d’une organisation ou d’une marque.
Pour mettre en adéquation les valeurs politiques constitutives des associations citoyennes et le contenu de leur message, il convient de rompre avec l’approche gestionnaire de la communication au profit d’une approche démocratique visant la participation. Or, la communication associative promue par les sciences de gestion et les agences de marketing se limite souvent à une approche persuasive, axée sur la promotion d’une image de marque, l’adhésion des publics et la collecte de dons. Cela n’encourage pas une participation véritable.
L’usage d’une communication marketing, c’est-à-dire d’une norme inspirée de l’entreprise, n’est pas sans conséquence pour les associations citoyennes. Au-delà de son coût exorbitant et de son manque d’efficacité, les techniques marketing posent des problèmes externes et internes.
À l’externe, cette approche semble dépolitiser les associations, car les outils sont conçus par et pour le marché, contribuant ainsi à le renforcer. Par exemple, l’usage du marketing par de grandes ONG a créé un marché du don, marchandisant un geste essentiel à la vie sociale. Dans le domaine de la solidarité internationale, le marketing est utilisé pour collecter des fonds, mais selon des recherches, il ne convainc guère à donner pour une association plutôt qu’une autre. Il contribue à donner une représentation philanthropique de la solidarité, à l’opposé des valeurs politiques de solidarité démocratique que promeuvent les ONG de solidarité internationale. Leurs pratiques de communication deviennent alors contradictoires avec leur objectif de transformation sociale.
I.2 Une autre conception de la communication est possible
Persuader n’est pas communiquer. Ce n’est pas non plus manipuler. On a tendance à confondre sous l’appellation « la com » trois processus distincts :
La communication, qui est une co-construction critique de sens
La persuasion, un processus intentionnel d’influence visant à changer l’attitude d’autrui (y compris pour son bien)
La manipulation, une stratégie dont la finalité est de tromper le public et qui n’est développée que dans l’intérêt exclusif de l’institution qui l’utilise.
Même si l’on sépare la communication des techniques marketing persuasives qui tendent parfois vers des pratiques manipulatoires, la communication reste un processus complexe car profondément ambivalent. Elle recoupe partiellement des processus de mise en relation sociale aussi différents que la transmission d’information, l’expression publique, la conversation privée, la connexion numérique.
Ne reste que son noyau dur, ce que nous avons appelé sa logique propre : le partage entre altérités libres et égales. Autrement dit, la communication, comme la démocratie, vise l’élaboration d’un lien social égalitaire qui respecte la liberté et la différence de chacun.
Or cette incompréhension est le moteur même de la communication. C’est dans l’impossibilité d’une compréhension parfaite que nous puisons le désir de comprendre l’autre ! L’incommunication n’est donc pas une fatalité, mais une chance : celle de s’ouvrir à l’interprétation de l’autre.
Cette chance est aussi un avantage démocratique sur lequel s’appuyer : plutôt que de chercher à persuader l’autre, à limiter sa capacité d’interprétation pour l’amener à nos positions, mieux vaut renforcer sa liberté d’interprétation, accroître son autonomie critique.
C’est là le but de ce que nous nommons la communication solidaire.
Pourquoi nous avons choisi ce manifeste comme boussole
Xaiahub est né d’un constat que beaucoup partagent, sans toujours oser le formuler : la plupart des outils de communication sont pensés pour vendre, pas pour relier.
Ils imposent des formats, des mots, des chiffres. Ils exigent de performer, d’attirer, de transformer les bénéficiaires en “cibles” et les idées en “produits”.
Ce que nous défendons concrètement
Si ce manifeste vous parle, vous êtes déjà des nôtres.
Vous n’avez pas besoin d’adhérer. Vous êtes déjà concerné si vous vous reconnaissez dans ces lignes.
Vous pouvez faire vivre cette vision :

3 Principes clés
Principe 1

Mieux vaut renforcer la liberté d’interprétation que limiter la capacité à comprendre.
Principe 3

Créer du lien plutôt que produire de l’adhésion.
Principe 3

Refuser la com marchande, ce n’est pas refuser de communiquer.